Mayotte: sommes-nous prêts à rendre notre société meilleure ?

Mayotte: sommes-nous prêts à rendre notre société meilleure ?

Beaucoup de nos compatriotes ne comprennent pas ce que la France fait à Mayotte, ne comprennent pas que les mahorais n’aient pas voulu de la décolonisation, ne comprennent pas que les mahorais acceptent une société profondément néocolonialiste.

Ils ne sont pas tous sournois et certains sont réellement de bonne volonté et comprendront. Ils n’ont pas tous le temps de plonger dans la lecture des livres relatifs à notre histoire et lorsqu’ils regardent la télévision mahoraise, ils voient des mahorais en colère et trouvent du coup que les mahorais passent leur temps à se victimiser.

Que faire ?

Il me semble important que nous, mahorais, fassions un réel travail de sensibilisation de notre combat, de nos valeurs, auprès de nos autres compatriotes, ceux qui arrivent tous les ans sur notre territoire et ceux qui vivent ailleurs et notamment en métropole.

Il me semble important aussi de réaliser que parmi les habitudes qui se sont instaurées au sein de notre société, certaines sont résolument anti-républicaines, contraires aux idéaux de la France.

La France, c’est une conception de la justice sociale, c’est une conception de l’égalité et c’est surtout une longue tradition de défense de l’intérêt général et des principes indispensables à une démocratie pleine et effective.

Sur la scène politique mahoraise, le jeu démocratique n’est pas du tout respecté. Ceux qui sont au pouvoir ne défendent pas ou défendent seulement peu leur orientation ( lorsqu’il y en a une) et l’opposition est quasi inexistante.

Ce fait est problématique, par ce que la démocratie a besoin que se distinguent clairement, deux camps, celui au pouvoir, la majorité, et celui qui souhaite conquérir le pouvoir, l’opposition. Les débats entre ces deux camps sont le moteur du changement et du progrès.

Mais ces débats sont inexistants à Mayotte. On a bien des partis politiques, mais leurs membres y adhèrent par pur opportunisme dans l’écrasante majorité des cas, d’où la grande proportion de candidatures dissidentes. Au sein du département, les membres d’un même parti politique vont être en partie au sein de la majorité et en partie au sein de l’opposition.

Au final, la réelle opposition au sein du département, ce sont les élues, aussi bien celles de la majorité que celles de l’opposition, par ce qu’elles sont les seules à mettre régulièrement en lumière le décalage entre la manière dont les choses devraient être et ce qu’elles sont…

En plus des incohérences de notre scène politique locale, nous devons aussi reconnaître que le sort de la femme mahoraise, largement toléré, est profondément anti-républicain.

Même si officiellement la polygamie n’existe plus à Mayotte, de nombreuses mahoraises subissent ce fléau et beaucoup, dans les faits, n’ont d’autre choix que de s’occuper seules des enfants, les pères considérant, assez souvent, que l’éducation des enfants est exclusivement du ressort des mères.

Je viens de citer quelques éléments de notre société, mais il en existe tant d’autres, notamment le sort que nous réservons à notre environnement si paradisiaque….et surtout la manière dont nous piétinons ceux qui parmi nous, ont le mieux réussi.

Ma question est celle-ci, sommes-nous prêts à rendre notre société meilleure, à l’aide notamment des principes que consacre notre République ? Sommes-nous prêts à changer, pour une vision plus progressiste en somme, aussi bien concernant notre pratique de la démocratie que concernant toutes ces règles qui organisent nos vies familiales et conjugales ?

Par ce que si nous changeons, alors notre société aussi changera.
Mana Ra hashiri.

 

Par Yasmina AOUNY

Porte parole des femmes leaders de Mayotte

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